dimanche 13 novembre 2016

Un très beau week-end !

La semaine dernière a été difficile, j'aurais dû être à Paris jusqu'à dimanche, j'aurais voulu découvrir la féerie de Noël avant même saint Nicolas, non pas que je préfère le barbu du nord, il ne fait pas partie de ma culture, mais pour découvrir les nouvelles créations de l'Insolent parisien dans cette boutique éphémère qui doit être à l'image de ThéÔdor à la fois sobre et très chic. Non je n'ai pas viré ma cuti, je n'apprécie pas les thés de Noël classiques, trop parfumés à mon goût, limite écœurants. Sauf dans les desserts: mousse au chocolat, gâteaux et glaces: http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2008/12/ce-fut-nol-avant-lheure.html . Mais quand j'ai lu la description de ces nouvelles créations, j'étais très impatiente de les découvrir, ces parfums aux notes boisées m'évoquent tellement la nature: "Thé noir aux notes dominantes de mousse de chêne, romarin, cranberry ; thé vert notes de bourgeons de pin, verveine, baies de genévrier et groseille ; thé blanc notes de cèdre, basilic, mûres".Je sais où je pourrai les trouver mais j'aurais voulu les savourer en compagnie de ma famille du thé... Mais je sais où je pourrai bientôt les trouver. 
Ce samedi matin, le ciel est gris et quasi sans lumière et au sol, les premières gelées blanches, 
c'est le moment de choisir un thé de lecture, doux mais qui réchauffe
et de me replonger dans ce livre-bijou dont certains passages m'ont littéralement bouleversée. 
J'aime les parfums qui se dégagent de la théière lors de l'infusion, et que dire de ces notes à la fois boisées et légèrement miellées dans ma tasse... Aux émotions gustatives succèdent maintenant celles tout aussi intenses que provoque cette re-re-relecture dont je peux redire par cœur certains passages, entre autres :
"La neige est un poème. Un poème qui tombe des nuages en flocons blancs et légers". Tout le livre tourne autour de ces deux mots : neige et Neige... Yuko, le héros de l'histoire, est né dans une famille aisée, son chemin était tout tracé, il n'avait que deux choix : la religion et l'armée. Alors quand il annonça à son père qu'il voulait devenir poète, celui-ci lui répondit : "La poésie n'est pas un métier, c'est un passe-temps. Un poème, c'est une eau qui s'écoule. Comme cette rivière". Sa réponse fut : "C'est ce que je veux faire. Je veux apprendre à regarder passer le temps". Yuko aime les haïku, la neige et le chiffre 7 : "Le chiffre 7 est un chiffre magique. Il tient à la fois de l'équilibre du carré et du vertige du triangle. (...) Il avait promis à son père d'écrire seulement 77 haïkus par hiver. Le reste de l'année, il resterait à la maison et oublierait la neige". En voici un des derniers :
"Neige limpide
Passerelle du silence
Et de la beauté"
Je ne suis toujours pas attirée par cette poésie particulière, peut-être parce que les haïku sont traduits et n'ont donc pas la musicalité des sons du japonais, mais aussi et surtout parce que certains n'ont rien de poétique (pour moi) :
"Femme accroupie
Urine et fait fondre
La neige"...
Je retrouve les mêmes émotions que lors de mes lectures précédentes même si le sujet improbable des haïkus (la neige !) me fait frissonner !, particulièrement ce sublime passage extrait d'une conversation entre un poète de la cour et le jeune garçon qui lui dit : "Je suis poète, j’écris des vers. Je n’ai pas besoin de savoir autre chose pour accomplir mon art" Il répondit : "Erreur. La poésie est avant tout la peinture, la musique, la chorégraphie et la calligraphie de l'âme. Un poème est un tableau, une danse, une musique et l’écriture de la beauté tout à la fois. Si tu désires devenir un maître, il te faudra posséder le don d’artiste absolu. Tes œuvres sont merveilleusement belles, dansantes, musicales, mais aussi blanches que de la neige. Il leur manque la couleur, la peinture. Tu n’es pas peintre Yuko. C’est cela qui te fait défaut. Simplement cela. Et c’est pourquoi, si tu ne m’écoutes pas, ta poésie restera invisible aux yeux du monde". Il lui conseille alors d’aller son vieux maître Soseki qui possède l’art absolu. Ce qu’il fit. Ce qu’il ne savait pas c’est que le vieil homme était aveugle, il se demandait ce qu’un aveugle pourrait bien lui apprendre sur les couleurs et le dit à son serviteur: "Ne te fie pas aux apparences. Cela ne sert à rien qu’à se perdre". Arrivée à ce stade de ma lecture, j’ai pensé à un autre livre sublime, le petit Prince : "On ne voit bien qu’avec le cœur, l’Essentiel est invisible pour les yeux". Ce fut pour moi la plus belle partie de l’histoire, encore plus bouleversante que le début, c’est ici qu’apparut Neige : "Elle était funambule et sa vie tenait en une seule ligne. Droite. (…) C’était son destin. Avancer pas à pas. D’un bout à l’autre de la vie". Elle fut le grand amour de Soseki, à ses yeux : "elle paraissait un poème, une peinture, une calligraphie, une danse et une musique tout à la fois. Elle était neige et représentait toute la beauté de l’art. (…) C’est ainsi qu’il devint pour l’amour d’une femme, poète, musicien, calligraphe, danseur. Et peintre". C’est à cause d’elle qu’il devint aveugle. C’est grâce à elle qu’il devint l’artiste absolu. "C’est dans le noir le plus profond que Soseki a peint la blancheur, a découvert la pureté. Ensuite il a découvert que la vraie lumière et les vraies couleurs demeurent à jamais intrinsèquement liées à la beauté de l’âme. (…) Du néant il a extirpé la quintessence de l’art" Parmi les dernières pages, je retiens tout particulièrement ce passage, le dernier message de Soseki à son jeune élève : "(…) En vérité le poète, le vrai poète, possède l’art du funambule. Ecrire, c’est avancer mot à mot sur un fil de beauté, le fil d’un poème, d’une œuvre, d’une histoire couchée sur un papier de soie. Ecrire c’est avancer pas à pas, page après page, sur le chemin du livre. Le plus difficile, ce n’est pas de s’élever du sol, et de tenir en équilibre, aidé du balancier de sa plume, sur le fil du langage. Ce n’est pas non plus d’aller tout droit, en une ligne continue parfois entrecoupée de vertiges aussi furtifs que la chute d’une virgule, ou que l’obstacle d’un point. Non, le plus difficile, pour le poète, c’est de rester continuellement sur ce fil qu’est l’écriture, de vivre chaque heure de sa vie à hauteur du rêve, de ne jamais redescendre, ne serait-ce qu’un instant, de la corde de son imaginaire. En vérité, le plus difficile, c’est de devenir un funambule du verbe" . Comment ne pas être émue face à de tels propos, même après trois lectures… Et il y en aura d’autres, c’est certain ! Et dire que j’aurais pu découvrir ce trésor bien plus tôt. Mais j’avais tellement aimé Opium que j’avais peur d’être déçue. Maxence Fermine en a écrit d’autres, je sens que je vais me les procurer, même si certains titres … Mais il faut redescendre sur terre, si tout va bien, je serai absente demain, il faut que je prépare de quoi sustenter mon mari. Ce soir après le souper, retour dans mon cocon. 
Il fait glacial dehors, ce Kyo-Bancha griffé Azumaya me réchauffera. 
Pour me mettre dans l’ambiance de demain, je réécoute ces contes japonais, et décidément si j’aime les textes, je ne supporte pas la voix de la conteuse, ce fut déjà ma première impression (
http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2015/08/et-ca-continue-de-plus-belle.html ) et cela se confirme malheureusement. J'arrête le disque et je lis à haute voix les histoires si joliment illustrées. 
Par contre, les saveurs puissantes de l’infusion me plaisent, j'ai un fou rire en me rappelant certains commentaires, entre autres ici :
http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2016/01/troisieme-week-end-de-janvier-encore.html ... 
Mes pensées s'envolent vers Anvers et plus particulièrement le Japon... Ce dimanche j'ai raté le train de 8h34, le suivant est à ... 10h34. 
D'habitude, il y en a un toutes les heures mais à cause des travaux, il y en a seulement toutes les deux heures. Dans le train, la préposée contrôle mon billet, et me dit que celui-ci est valable pour les seniors à partir de 65 ans,
"il faut donc les avoir madame". A son ton de voix et son air renfrogné, j'ai senti qu'elle ne plaisantait pas. Je lui propose alors de lui montrer ma carte d'identité, lui disant que je n'était plus dans la tranche des 60 depuis plus de 5 ans. Elle s'est alors radoucie, elle m'en donnait à peine 60 ! Nous étions 4 dans le petit wagon de première, cela a permis de faire connaissance, entre seniors ! 
La gare d'Anvers est magnifique, elle me fait penser un peu à Grand Central, pourquoi ? Je n'en sais rien, elle n'a rien à voir mais j'ai l'esprit vagabond sans doute. Dans le train, j'ai lu le SMS de Cathy m'annonçant que je devais prendre un pique-nique, il n'y a rien au Vlaamsekaai. Et moi que rêvais de manger japonais... 
Je me dirige alors vers
Le Royal, une brasserie à la magnifique architecture. En regardant la table d'à côté, je choisis le même menu : 
un croque-monsieur aux champignons des bois, un vrai délice. 
Pour suivre, un vol-au-vent, et là c'est autre chose, positivement immangeable, le poulet est plutôt un vieux coq très coriace, et les choux de Bruxelles (que j'aime pourtant) n'ont rien de frais, trop cuits et certainement surgelés. Je le laisse et je veux me consoler avec un thé... 
mais
"hier mevrouw, alleen maar koffie". Il était vraiment excellent et m'a rappelé ma folle jeunesse, j'étais alors caféinomane, on verra ce que mon estomac va en penser. 
J'ai hâte de revoir mes amis,
"ma famille anversoise du thé", mais ce sera pour demain... Je suis fatiguée et je ne veux pas rater LA lune ! Le voyage de retour fut épique, vu les travaux le train est resté à l'arrêt plus de 20 minutes, il n'y a qu'une voie disponible et il fallait attendre que deux train express passent... no comment ! Je suis restée cependant très zen, il y a de l'école Urasenke dans cet état... J'en dirai plus demain

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